[Exclu telestar.fr] Vendée Globe 2016 : Vincent Riou nous parle de son quotidien de skipper
Après avoir interviewé Jean-Pierre Dick la semaine dernière, telestar.fr est parti à la rencontre de Vincent Riou, un autre skipper qui participe également pour la 4ème fois au Vendée Globe. Après son succès en 2004, ce sportif de 44 ans est prêt à tout pour remporter cette nouvelle course. Résidant à Loctudy dans le Finistère, le skipper de PRB nous raconte sa journée-type en mer.
Des repas à heures fixes
« Ce qui structure le plus nos journées, ce sont les classements (il peut y en avoir 6 à 8 par jour), et les 4 bulletins de prévisions météos quotidiens, qui arrivent souvent à des heures différentes. Car forcément, ces données nous font faire des choix stratégiques. Les repas, j’essaye de les garder, autant que possible à heures fixes même si la navigation passe en priorité. Car sur 70-80 jours, il faut garder un rythme de vie a peu près correct. Donc moi, je prends un petit-déjeuner le matin, un repas à midi et un dîner le soir.«
Gérer son sommeil
« Pour le sommeil, ce sont des périodes de 15min à 1h. Quand on n’a pas de sollicitations particulières, on essaye de dormir à des moments où l’on sait que le sommeil est le plus efficace, le plus réparateur pour nous. Il m’arrive de dormir un peu le jour, par exemple après un bon repas. La nuit, même si on ne dort pas énormément, reste quand même une période moins active en raison du manque de lumière. Il faut aussi savoir que le sommeil en mer est moins reposant car il y a beaucoup de bruit, de mouvement, et on développe même inconsciemment un état d’hyper vigilance, on est attentif à tout. Grâce à la lumière, au soleil, je dirais qu’on sait toujours de façon presque « biologique » quelle heure il est approximativement. Pour vivre sur mer en dormant peu et de façon fragmentée, il faut se faire violence. Alors que quand on revient sur terre, se trouver dans un lit bien chaud pendant 8-10h de suite, on s’y réhabitue très vite (rires).«
Beaucoup de réflexion
« Chaque jour, on est guidé par une petite routine avec des tâches à effectuer, des vérifications, des petites réparations, et surtout beaucoup d’anticipations en fonction des futures conditions météos, pour des choix de voiles par exemple où même savoir comment il faudra s’habiller dans quelques heures. Mais il y a aussi des moments où il ne se passe pas grand-chose. En revanche, on cogite tout le temps, en se demandant si on a fait les bons choix, vu que notre stratégie s’établit en fonctions de prévisions météos à moyen ou long terme, donc on est toujours un peu dans des sables mouvants, ça demande de se remettre en question en permanence. On a toujours beaucoup de pression sur les épaules.«
Quelques pauses pour les loisirs
« Quand les conditions sont bien établies, que le bateau avance de façon satisfaisante, on peut s’offrir une petite pause, « sortir » de la course même si c’est rarement possible. Donc j’essaye de lire un peu en emportant des livres et une liseuse, ou en écoutant de la musique au casque car sinon le brouhaha est trop fort. Je n’emporte pas d’objets particuliers dans le bateau mais pas mal de photos de mes proches. Je ne fais pas de gym ou d’étirements à bord, je sais que ça serait mieux… Car on effectue souvent des mouvements dans l’urgence, mais s’étirer après une manœuvre pour laquelle on ne s’est pas échauffé, je pense que ça ne sert à rien.«
Comment se prépare-t-on physiquement et mentalement au Vendée Globe ?
Vincent Riou se promène tout le temps en skateboard, ce qui lui fait travailler l’équilibre et la proprioception (ndlr : la perception de la position des différentes parties du corps). Sinon son programme se compose de course à pied, au moins deux fois par semaine, sessions en salle de sport pour le gainage et le renforcement musculaire, vélo, stand up paddle quand il n’y a ni mer ni vent, et surf quand les vagues sont là. Sur le plan mental, Vincent se prépare seul car il n’a pas trouvé « la personne avec qui faire ce chemin au long cours, parce qu’il faut se sentir à l’aise pour la laisser entrer dans son intimité« . Le skipper de PRB travaille notamment ses points faibles et l’optimisation de la performance : « Il s’agit d’un chemin très personnel, cérébral, qui peut s’arpenter par les lectures et tous les moyens qui permettent de s’instruire. Ce qui est sûr, c’est que je n’ai pas de problème de motivation : une fois que j’ai décidé d’y aller, je me donne entièrement.«
Comment choisit-on sa route en fonction de la météo ?
« Le problème ne vient pas des phénomènes généraux, que nous connaissons par cœur, mais des situations, qui ne sont jamais les mêmes. La course se joue sur des détails qu’on va découvrir à mesure qu’on avancera. Le choix, c’est justement la difficulté de la course au large : il faut être capable d’improviser au quotidien face à des conditions évolutives. Ce qui nous intéresse, c’est la précision. La grosse difficulté n’est pas de savoir où je veux être dans 8 ou 10 jours, mais ce qui m’attend si j’opte pour cette option. Il faut se garder de faire des choix qui pourraient mener à une voie de garage, ce qui implique de réfléchir avec deux ou trois coups d’avance. Il n’est pas possible de suivre aveuglément ce que l’ordinateur va afficher comme fichiers de vents. Le tempérament du marin influence évidemment ses choix. Il y a des solutions simples et sûres, mais qui ne sont pas les plus rapides, et des voies qui peuvent être performantes, mais avec des probabilités moindres. C’est dans le dosage entre performance et sécurité que s’expriment les tempéraments. Certains gagneront parce qu’ils auront pris des risques quand d’autres gagneront parce qu’ils ont misé sur la raison… et regardé les plus agressifs se planter.«
Débutée le dimanche 6 novembre dernier, vous pouvez suivre la course du Vendée Globe sur le site, l’application mobile ou encore sur certaines chaînes de télévision. Si vous désirez suivre Vincent Riou, vous pouvez vous rendre sur son compte Facebook ou bien sur ce site de sports PRB.
Source: TeleStar | NonStopZapping